Un coq chantait si fièrement qu’un aigle envieux s’en irrita… C’est ainsi que La Fontaine aurait pu commencer une fable sur une vieille rivalité franco-allemande.

Expression d’une volonté impériale germanique, l’aigle ne cesse d’inquiéter. A tout instant, on le sent prêt à fondre sur quelque innocent agneau égaré… Tandis que le coq, ce sympathique volatile, incarnation de la fierté gauloise, contemple hardiment nos tranquilles campagnes. Mais d’où viennent vraiment ces deux volatiles que tout semble opposer ?

Le coq – en latin gallus (un gallinacé) – a un air de famille avec le fier Gaulois que moquaient les Latins. Pas rancuniers les Français ! Ils ont su tourner cette dérision à leur avantage. Mais sait-on que les aigles impériaux de Byzance, de Charlemagne, du Saint Empire, de la Sainte Russie, etc. nous viennent aussi de Rome ? Signe jupitérien, oiseau sacré des légions romaines, fièrement porté à leur tête par l’aquilifer, l’aigle des Césars est le symbole de l’efficacité de la vigilance impériale au dessus des petits royaumes querelleurs.

Le pouvoir impérial n’est pas ivre de conquête, mais soucieux de la paix universelle – la Pax Romana – la première tentative de pacification de l’Europe et de l’Orient. Les Kaisers ou Csars (ou Caesars) des Empires Chrétiens, dans leur volonté de faire durer l’Empire de Rome, montreront l’aigle impérial partout où l’exercice de leur arbitrage souverain l’exige. Dans la constitution du Saint Empire Romain (*), l’Empereur n’a pas le droit de guerre à l’extérieur des frontières. Les « Impériaux » ne sont pas son armée mais les fidèles vassaux qui mettent leurs soldats au service de la paix intérieure, sous le regard aiguisé de l’aigle.

L’aigle ne possède que sa vigilance. Ceux qui se battent, ce sont les lions, les ours, les panthères, les léopards, les loups… On les retrouve sur les écus des royaumes et des chevaliers. Leurs griffes et leurs dents sont autrement plus offensives que les serres de l’aigle.

Quant aux aigles de Napoléon et d’Hitler, ils sembleraient plutôt usurpés.[divider][/divider]

(*) l’ajout « de Nation Allemande » ou « Germanique » n’apparaîtra qu’à la fin du XVe siècle et n’a plus été utilisé dans les actes officiels au delà du début du XVIIe. Sa réutilisation depuis la seconde moitié du XXe pour désigner la période qui va d’Otton Ier jusqu’en 1806 est un abus de langage.